Juin 2015 – Janvier 2016
Point de relais des gauches anti-austéritaires européennes et laboratoire ouvert aux miracles discrets du quartier Fernand Cocq.
Maison cherche Peuple, Peuple cherche Maison. Va-t-elle le trouver si rapidement ? Va-t-il la trouver si vite ? Six mois, c’est ce qu’on se donne. C’est ce qui est compté. On ouvre ici une Maison du Peuple, que le peuple retrouve ces maisons que le capitalisme n’a même pas eu besoin de détruire, le socialisme s’en étant chargé tout seul.
La dette grecque, le TTIP, les manifestations syndicales contre l’austérité, la COP 21, les élections espagnoles, c’était à peu près l’agenda. A quoi sont venus s’ajouter en Europe les migrants de l’été, à Paris les attentats de l’automne. Et à Bruxelles, le lockdown.
La Maison et son peuple ont fait deux inaugurations. Une première le 16 juillet, une deuxième le 11 septembre. Le 16 juillet, il y avait juste quelques tables et dessus des feuilles de papier. Table un, « Cet endroit a bien besoin d’un nom. Non ? C’est ici qu’on en cause ». Table deux, « Lundi, il devrait y avoir ici une tonne de pommes de terre à se partager. Pas au prix du marché. Au prix du fermier. Comment on fait ? ». Table trois, « Dans ces 1010 tiroirs, il y a des histoires. A échanger, à partager, à offrir. Et des moyens à trouver. Pour continuer de les ouvrir ». Table quatre, « Ici, il devrait y avoir un bar. De quoi manger un peu et une épicerie avec des produits de coopératives de l’Europe anti austéritaire. Ça va pas être coton. Déjà y a pas d’eau. » Table cinq, « Le quartier touche presque l’Europe du doigt. Mais le quartier, ce sont surtout des habitant.es avec lesquels faire cause commune. Les idées de coopération, c’est d’ici. » Table six, « Ici, il y a des salles, des pièces et des recoins.De quoi lire, projeter, dire, jouer,… Pour les propositions de programmation, c’est là. » Entre le 16 juillet et le 11 septembre, on prépare. On prépare le bar, le nom, la programmation, l’histoire à tiroirs, l’heure coopérative.
Un laboratoire des miracles discrets du quartier. Le quartier général des gauches anti austéritaires. Le chaînon manquant du politique. Le quartier ne veut pas du mot café, bar, bistrot, buvette. Maison du Peuple non plus. Tout ce qui nommerait sans nommer vraiment l’indiffère. Ne pas tourner autour. Il veut quincaillerie. Il trouve que Quincaillerie des Temps Présents, ce n’est pas si mal, finalement. Que ça dit bien ce que ça veut dire.
Texte lu lors de l’inauguration
Ce sera un texte un peu fatigué, j’en suis désolé. Tout cela est un peu précipité. Les choses de tout façon se précipitent. Nous n’avons pas eu beaucoup de recul, ni avec ce lieu ni avec autre chose. Ce sera un peu fatigué, un peu dépité aussi pourquoi pas.
Parce que c’est là, juste après que Syriza a vécu ces heures d’hier et des jours qui ont précédé, que nous ouvrons ce lieu qui, précisément, se veut être le point de relais des gauches anti austéritaires européennes ; les métallos disaient il y a quelques mois, il nous faut ouvrir quelque chose, un lieu, quelque chose, qui accompagne aussi les élections espagnoles, il faut se mettre sur cette route-là, il faut que l’on montre que les alternatives, ce que Isabelle Stengers appelle les miracles discrets, elles peuvent se fédérer, qu’elles peuvent, qu’elles doivent, après Syriza, Podemos, allons il faut tailler cette route là, c’est ce que disaient les métallos.
J’espère que tout à l’heure, de retour de Berlin, Nico Cué aura quelque chose à nous dire. Les métallos de la FGTB, Nico, Najar, Jean-Michel, Antoine, les autres, sont à l’origine des Acteurs des Temps présents et nous sommes fiers d’être nés de ce feu là. Tandis que les fermiers, les paysans de la FUGEA, les petits agriculteurs quoi, qui ont été les premiers à rejoindre ont apporté autant de terre que nécessaire. A Nico, à Philippe on va dire que cette inspiration qu’ils ont eue de mêler terre et feu, comme si l’eau et l’huile étaient mêlables et que c’était jouable des métallos et des agriculteurs…, on va dire que ça les gars, c’était le truc qui manquait, le chaînon manquant du politique. Et moi c’est là que j’ai compris que le rapport de force c’était d’abord un rapport.
C’est ce rapport là qu’il nous faut repenser après Syriza. Aujourd’hui, à ce propos comme à d’autres, tout peut se dire et se penser. Une seule chose est impensable. Ce serait d’abolir nos rêves. Car nous avons au moins compris cela depuis Syriza, c’est que nos rêves à nous sont les cauchemars d’autres. Nous savons maintenant intimement que nous inspirons une haine que l’on réserve d’ordinaire à celles et ceux qui auraient contrefait les lois des hommes et des gens. Là, maintenant, aujourd’hui, nous savons qu’une lutte à mort est engagée et que cette lutte est à notre mort.
Il est absolument plus lumineux que jamais que d’aucuns ne veulent pas de ce que nous représentons, de ce que nous voulons et qu’ils sont prêts à aller très loin pour ça. Il n’y a plus de faux-semblant. La démocratie n’est même plus pur eux un mot servile et serviteur. Ce que nous sommes ne peut simplement pas exister, c’est tout.
C’est pourquoi ceci. C’est pourquoi ceci ici, à côté de l’Europe. C’est pourquoi ici. Ceci est un élargissement de l’Europe. Car oui, nous voulons élargir l’Europe, nous voulons l’élargir comme on dit qu’on élargit un prisonnier lorsque l’on a décidé de le libérer.
Bon, qu’est-ce qu’on va faire ici alors ? Nous on a juste trouvé les sous pour louer. Six mois. Un lieu qui raconte le travail, un lieu du métal, un lieu de maison du peuple. On a la maison. C’est déjà ça…. Maison, cherche peuple, urgent. Accompagner les élections espagnoles disaient les métallos… Maison, cherche peuple, urgent… Ecrire aux acteurs qui transmettront. On a pris des risques, on a juste décidé d’avoir un lieu, quelques idées. Pour le reste, le lieu est vide, il n’a pas de nom, il est à investir. Il est à beaucoup sinon à tout le monde. Tout ce que l’on vous dit, c’est qu’on a vraiment, foutument besoin de coups de mains si on veut y arriver. On a idée de travailler l’Europe, on l’a dit, et aussi ce quartier ici qui est une des portes de l’Europe. Ce quartier ci n’est pas du tout l’Europe d’à côté. Il se passe plein de choses dans ce quartier. Il est rempli de miracles discrets. Et nous avec le quartier et à côté de cette Europe là, nous allons être pendant 6 mois un laboratoire de ce qui peut se faire.
Il y a des tables ici et là, dans la salle, avec une feuille dessus, qui propose un sujet de discussion, qui demande un coup de main qui appelle à idées. Nous allons commencer comme ça.
Premier acte du laboratoire. C’est maintenant. Et ça va, on n’est plus du tout fatigué, on n’est plus du tout dépité. On a une foutue envie de faire vivre un lieu mis à disposition… Et on salue avant de terminer ceux qui se sont engagés et déjà cotisés les gens des Métallos, des Acteurs, de Causes Communes, de Bruxelles laïque, de la Fugea, celles et ceux qui vont bientôt venir et qui vont rejoindre, enfin nous tous qui voulons recréer des communs.
Les tables sont ouvertes.
Le bar aussi, à vous, à nous.